India

Une année d'échange à Chennai, l'alternative originale

Quand on parle d'échange universitaire, on pense tout d'abord au programme Erasmus, qui propose des destinations européennes « classiques « comme l'Espagne ou la Suède. Il en existe pourtant d'autres, plus exotiques. En voici un petit aperçu avec quelques impressions de mon séjour à l'Indian Institute of Technology Madras (IIT), en Inde, en 2006-2007.

Chennai
Anciennement appelée Madras, Chennai est la quatrième plus grande agglomération d'Inde, avec plus de 7 millions d'habitants. Mais Chennai est moins connue que ses grandes soeurs Delhi, Mumbay (Bombay) et Calcutta. Située sur la côte sud-est du pays, cette ville est en effet beaucoup moins touristique que le nord et, du même coup, beaucoup plus traditionnelle et conservatrice. La ville elle-même n'est pas très agréable, avec ses bouchons à n'en plus finir, ses mendiants vous assaillant de toute part et les déchets qui ornent les rues…

Le Campus
Heureusement, le campus est quant à lui situé dans un véritable îlot de verdure au milieu de la ville. On a un peu l'impression d'entrer dans la jungle. Sur le campus, les étudiants habitent dans les « hostels », de grands bâtiments en béton. Parfois assez vieux, ceux-ci abritent des chambres individuelles pour les étudiants. Deux « hostels « sont réservés aux filles, les autres aux garçons, et des gardes surveillent le trafic…

Faire le singe
Le campus est aussi un abri pour de nombreux animaux, dont les plus courants sont les daims et… les macaques ! C'est l'un des souvenirs les plus mémorables pour moi, ces singes qui se baladent partout, renversent les poubelles, volent vos bananes et, parfois, vous effraient. Ouverts vers l'extérieur, les couloirs sont facilement accessibles pour les macaques. Fermer la porte est donc indispensable. Il m'est d'ailleurs arrivé une ou deux fois de rentrer dans ma chambre et, en me retournant, de me retrouver nez à nez avec l'un d'eux, qui montrait ses dents menaçantes et ne semblait, lui non plus, pas tout à son aise…

La vie estudiantine
Au campus, c'est toute une vie qui se déroule. On s'y déplace principalement en vélo. L'alcool y est strictement interdit, et d'ailleurs très peu toléré en Inde. Faire la fête ne s'inscrit pas dans les moeurs des étudiants indiens. A ne pas manquer : Gurunath, une sorte de bar où l'on savoure son jus de fruits frais presque quotidiennement.

La nourriture
Si la nourriture indienne est délicieuse, il faut admettre qu'elle devient rapidement monotone, surtout à la cantine. Le matin, il faut oublier les tartines et s'habituer aux déjeuners très salés et épicés. A midi et le soir, il s'agit toujours de riz avec différentes sauces. Le petit côté marrant, c'est de manger avec les mains. Eh oui, vous pouvez trouver une cuillère, mais rien ne vaut sa main (droite) !

Les cours
Si théoriquement, le niveau de l'IIT est équivalent à celui de l'EPFL, cela ne s'avère pas si évident en pratique. Bien que les compétences soient globalement plus ou moins égales, la manière d'apprendre diffère grandement. Alors qu'en Suisse, on nous oriente généralement sur la compréhension et le développement d'un raisonnement, c'est plutôt le « bourrage de crâne « qui semble prévaloir en Inde. Ainsi, on passe parfois des heures à s'imprégner de formules empiriques pour le calcul d'un paramètre, sans même en comprendre l'essence. Cela dit, on apprend quand même beaucoup. Certains cours plus alternatifs en sciences humaines ou sociales s'avèrent particulièrement intéressants. Un cours de théâtre, par exemple, m'a permis un bel échange avec les Indiens.

Les activités culturelles
On a également accès à un certain nombre d'activités sur le campus et en dehors. Bien qu'encore peu inscrite dans la culture indienne, la promotion du sport s'accroît fortement. Des tournois sont ainsi organisés entre les « hostels ». Parmi les plus mémorables, ceux de water-polo et de football, auxquels j'ai participé. Des activités non sportives sont aussi proposées, comme le chant et la musique. En dehors du campus, on peut s'initier à des pratiques plus locales comme le yoga, le Kalarhipayathu (un art martial), la danse, etc.

La barrière culturelle
Les contacts avec les Indiens ne sont pas toujours faciles et exigent un temps d'adaptation. Lorsqu'un Indien se sent votre pote, il a la fâcheuse habitude de vous tenir la main, voir de la caresser, et de vous tenir par les épaules… comme un couple européen. Au début, c'est vraiment bizarre, mais on s'y fait ! Quant aux relations entre hommes et femmes, ils en ont une image très différente. Traditionnellement, ce n'est pas tant une question d'amour que de choix des parents. Le sexe, on n'en parle pas. Paradoxalement, les temples sont souvent ornés de figures pour le moins évocatrices. Mais c'est aussi ça, l'Inde : le pays des paradoxes.

La vie Erasmus
On ne peut pas parler de vie Erasmus à proprement parler, mais il y a tout de même une quinzaine d'étudiants suisses, français et allemands. Tout le monde se connaît et l'on organise souvent ensemble un souper ou une soirée à l'extérieur.

Les voyages
Les opportunités de voyager ne manquent pas et sont accessibles à un budget d'étudiant européen. Alors, une fois sur place, on essaie d'en profiter au maximum ! Le week-end, on part souvent se reposer au bord de la mer, découvrir un lieu de pèlerinage hindou et quelques temples, ou encore rendre visite à un ami indien. Une fois atteint du virus du voyage, difficile de s'en débarrasser!

Le climat
Il fait chaud, très chaud… sauf pendant la mousson ! Il faut parfois marcher 30 mètres avec l'eau jusqu'aux genoux en plein milieu de la rue. C'est marrant une semaine, mais après deux mois… on se réjouit que ça cesse !

L'indian style
S'il y a quelque chose de particulièrement marquant, c'est bien l' « indian style ». Les hommes ont une grosse moustache et une chemise à carreaux, et les décorations sont kitch au possible : des figurines de dieux dorées, entourées de guirlandes clignotantes roses et bleues, des clips bollywoodiens dans une disco multicolore avec une chorégraphie sortie tout droit des années 70….

Le plus mémorable : Hodi
Ce matin-là, tout innocent, je ne me doutais de rien lorsque des potes indiens m'ont demandé de sortir de ma chambre avec un vieux T-shirt. A peine dehors, me voilà en train d'expérimenter le festival « Hodi », qui consiste à couvrir les autres de couleur ! Une journée folle a suivi, chaque Indien voulant colorer les Européens, et j'ai fini dans un bassin rempli d'une couleur rouge plus que douteuse, le T-shirt arraché. Superbe ! Mon visage est resté rouge pendant trois jours, malgré mes efforts. Mais ça valait le coup, ce n'est pas quelque chose qui arrive tous les jours. Que diriez-vous si je vous tartinais le visage de poudre colorée en pleine rue?