Pas à la même enseigne

des petits jobs pour tout le monde? du mythe à la réalité vraie...

En novembre dernier, l'équipe d'etudiants.ch avait monté un dossier complet sur les petits jobs (etumag012). Puis en décembre, nous t'avions présenté plusieurs portraits croisés sur les étudiants étrangers (etumag013). Ces deux thèmes ont suscité de nombreux feedbacks et parmi eux, celui de Victor, avec un mail particulièrement corsé, pour ne pas dire empreint d'une certaine colère.

Des poids, des mesures
Victor est passionné de droit , après un postgrade en droit international économique, il a poursuivi ses études en octobre dernier par un doctorat. Jusque-là, rien de très terrible... C'est en écoutant son récit que la réalité revient comme un boomerang en pleine poire. Le jeune Camerounais vit avec un budget mensuel proche des 900 francs, soit 2 fois moins que la moyenne suisse établie par l'OFS («situation sociale des étudiants» - rapport 2005). Ou plutôt manger, boire, dormir, étudier et s'habiller pour moins de 30 francs par jour...

A ce taux-là, comment s'en sortir? Réponse évidemment flagrante: en travaillant! N'est-ce pas Victor?

«Comme beaucoup d'autres étudiants non-européens, il est indispensable de travailler afin de poursuivre nos études. Le seul problème est que la loi n'est pas aussi simple que ça. Quel que soit le petit job que nous voulons faire, il faut obtenir un permis de travail. Cette procédure obligatoire pour tout travail auprès d'un nouvel employeur prend 1 à 6 semaines selon les cantons et dans certains, il faut même s'acquitter d'une taxe qui peut s'élever jusqu'à 100 francs! Des entreprises qui sont prêtes à de telles procédures pour 15 heures au maximum par semaine, vous en connaissez beaucoup?»

On peut entendre dans la voix de Victor de la frustration mais également de la résignation face à cet Everest de l'administration.

Pour jobs4students.ch, le service des petits boulots d'etudiants.ch, le problème des étudiants sans permis de travail est insoluble: 80% des missions offertes durent moins d'une semaine et leur mise en route est quasiimmédiate! Attendre un feu vert administratif qui peut prendre jusqu'à 2 mois? Impensable.

Et les agences de travail temporaire ? tout simplement «verboten» pour ce profil d'étudiants.

Pour ses études doctorales, Victor doit désormais beaucoup se déplacer, car les cours sont souvent dispensés dans d'autres universités. Ou quand le trajet Berne-Genève, se transforme en parcours du combattant, faute d'argent! «J'ai connu des périodes de grand doute, notamment au début 2006, lorsque je n'ai pas eu de petits boulots pendant plus de 7 mois. J'ai vécu sur les réserves d'un stage d'été auprès d'une ONG. Et en plus, je n'ai pas pour principe d'indisposer les autres avec mes soucis. Mais heureusement, j'ai ma famille qui m'envoie occasionnellement un peu d'argent.» Faute de moyens, un retour pour revoir ses proches est totalement exclu. «Et si je travaille, ce n'est pas pour me faire de l'argent, mais pour régler un besoin ponctuel, comme payer mon loyer ou acheter à manger.»

Le cas de Victor n'est pas unique. Selon lui, de nombreux étudiants recourent à de petits jobs non déclarés. «Manutention, boulots saisonniers, ménages, plonges dans les hôtels,... et certains employeurs ne sont pas très scrupuleux et profitent de cette situation vulnérable pour proposer des salaires entre 10.00 et 12.50 CHF de l'heure!» Et de poursuivre: «d'autres ont plus de chance, ils font des veilles la nuit pour pouvoir aller en cours la journée!»

Des solutions?
La situation actuelle semble au point mort. Victor est lucide: «il existe aussi des étrangers qui utilisent leur statut d'étudiants pour venir travailler dans les pays riches : selon moi, il doit y en avoir 5%! Mais ce chiffre ne doit pas généraliser la situation des autres étudiants».

Après la hantise du plombier polonais, faut-il aussi avoir peur de la concurrence de l'étudiant africain, chinois ou sud-américain?

Faut-il mettre sur pied des structures plus légères?

Autoriser certaines entreprises à engager plus rapidement ces étudiants avec des conditions particulières? Quelle entreprise est assez folle pour les enrôler sans autorisation préalable? Affaire à suivre...

Loi fédérale sur les étrangers
Article 27 Formation et perfectionnement

1. Un étranger peut être admis en vue d'une formation ou d'un perfectionnement aux conditions suivantes:

  • a. la direction de l'établissement confirme qu'il peut suivre la formation ou le perfectionnement envisagés;

  • b. il dispose d'un logement approprié;

  • c. il dispose de moyens financiers nécessaires;

  • d. il paraît assuré qu'il quittera la Suisse.

2. S'il est mineur, sa prise en charge doit être assurée.

conditions de séjour pour étudiants étrangers
Afin de bénéficier d'un droit au séjour en qualité d'étudiant, les étudiants et les écoliers doivent démontrer de manière crédible qu'ils disposent de moyens financiers nécessaires, afin de ne pas devenir pendant leur séjour une charge pour l'Etat d'accueil. Ils doivent également justifier qu'ils sont inscrits dans un établissement agréé pour y suivre, à titre principal, une formation ainsi que disposer d'une assurance maladie et accidents couvrant l'ensemble des risques.

Si ces conditions sont remplies, les étudiants et les écoliers se verront délivrer une autorisation de séjour d'une durée limitée à la formation ou d'une durée d'un an si la durée de la formation est supérieure à un an, prolongeable chaque année. En parallèle de leurs études, ils sont autorisés à exercer une activité professionnelle accessoire (limitée au maximum à 15 heures hebdomadaires).

Au terme des études, les étudiants peuvent poursuivre leur séjour en Suisse dans la mesure où ils remplissent les conditions de séjour prévues dans l'accord bilatéral (p.ex. en qualité de travailleur ou de non actif).